Début de saison: Encore des questions?

Même si tout le monde était prévenu, la gifle n’en est pas moins douloureuse: le Champion du Monde Max Verstappen et Red Bull ont repris, en ce début de saison, exactement là où s’était arrêtée leur voracité en décembre dernier. Le double succès de l’équipe tenante des titres s’est transformé en une nouvelle démonstration de force. La concurrence n’a qu’un mince espoir: que le circuit de Bahreïn ne soit pas représentatif des 23 courses à venir. Dès ce week-end, à Djeddah, la Formule 1 sera confrontée à un circuit ultra-rapide et difficilement prévisible. Mais la question reste entière: qui peut déstabiliser les taureaux? Eux-mêmes, tout au plus, si les luttes de pouvoir entre le team manager Christian Horner, la famille Verstappen, le siège autrichien du groupe et les propriétaires majoritaires thaïlandais ne cessent pas. Depuis longtemps, la dispute s’est transformée en une affaire qui concerne toute la Formule 1. Seul le Champion du Monde lui-même parvient à faire abstraction du «cirque» qui entoure l’équipe. Et cela témoigne aussi de son exceptionnel talent.

Dans ces circonstances, Frédéric Vasseur, qui a non seulement transformé l’équipe Ferrari l’an dernier, mais qui a aussi lancé sa Scuderia dans une chasse au Red Bull avec une nouvelle voiture, n’était pas si déçu que cela avec les troisième et quatrième places de Carlos Sainz et Charles Leclerc: «Pour nous, c’est effectivement un pas en avant. Nous avons pu réduire de moitié notre retard sur Red Bull.» Il s’agit désormais de trouver le bon équilibre et de mettre les choses ensemble. Vous direz peut-être que cela ressemble de manière suspecte aux slogans de persévérance déjà entendus en 2023, mais le Français y ajoute un point important: le peloton des poursuivants est plus serré que jamais, comme l’ont déjà montré les temps en qualifications, où Leclerc a une fois de plus laissé échapper une pole position. En course, un problème de freinage a été fatal au Monégasque. Vasseur attend donc de nouveaux progrès, même si Verstappen semble toujours aussi intouchable: «Je ne fais qu’un avec ma voiture.» Et Adrian Newey, le créateur des Red Bull, a déjà programmé la prochaine mise à jour de sa nouvelle voiture...

Dans sa propre galaxie

Chez Mercedes, la situation est similaire. À l’instar de la Ferrari, la nouvelle flèche d’argent a fait de nombreux emprunts à la Red Bull de l’année dernière; George Russell et Lewis Hamilton se sont effectivement beaucoup mieux débrouillés d’emblée, ce qui explique que les cinquième et septième places finales constituent un sérieux revers. Le patron Toto Wolff a d’ailleurs trouvé «extrêmement frustrante» la performance de cette soirée plutôt fraîche dans le désert: «Max ne roule pas dans sa propre ligue, il roule dans sa propre galaxie.» La désillusion a également touché les équipes McLaren et Aston Martin, considérées comme les bonnes surprises possibles: l’asphalte rugueux, la tactique et l’usure des pneus ont fait le reste. Dans une course où il n’y a eu aucun abandon, peu d’incidents et encore moins de dépassements, la déception s’est répandue à travers tout le peloton. Ce n’est peut-être pas atypique à ce stade précoce de la saison, mais il va falloir un changement radical pour que l’ennui ne s’installe pas rapidement. Autrement, le championnat pourrait devenir bien long.

Alpine a également besoin d’un changement. La rupture entre l’écurie et la maison-mère semble aussi importante que chez Red Bull. Le team de l’enseigne française était déjà à la traîne lors des essais et la débâcle s’est confirmée en course: les 17e et 18e places montrent où peut mener le délitement d’une écurie. Et chez Alpine, cela dure depuis des mois. À Bahreïn, on a appris que le directeur technique Matt Harman et le chef de l’aérodynamique, Dirk de Beer, avaient donné leur démission. Le patron du groupe, Bruno Famin, ne doit donc pas seulement trouver plus de puissance pour sa voiture, il doit aussi arrêter le carrousel de son personnel.

L’écurie Haas s’est montrée étonnamment plus forte que prévu, du moins avec Nico Hülkenberg. Les Racing Bulls (anciennement Alpha Tauri), n’ont pas réussi à franchir la barrière des points, tout comme Sauber. Dans le milieu du peloton, les écarts se réduisent également, ce qui signifie que des détails peuvent rapidement changer cette hiérarchie-là. Quoi qu’il en soit, l’espoir subsiste contre la menace de l’ennui: le doublé de Red Bull a peut-être été le début, mais ce n’est pas (encore) la fin. C’est ce que l’on souhaite en cette saison-marathon, qui devrait laisser beaucoup de place aux améliorations. «Nous ne devons pas cesser de mettre la pression», affirme Frédéric Vasseur.