Renault 16: un bouleversement dans la classe moyenne

L'appel de nombreux designers à des concepts de carrosserie disruptifs pour les voitures électriques s'est éteint. Au lieu de cela, les designs rétro sont en vogue, comme le montrent les petites Renault 4 et 5 électriques, évoquant ainsi le passé révolutionnaire de la marque au losange.

A l'époque où les Français risquaient le renversement dans toutes les catégories et redéfinissaient la classe moyenne bourgeoise au printemps 1965 avec la Renault 16. «Mon dieu, incroyable», s'étonnaient les patrons de Peugeot, Citroën et Simca en voyant cette berline cinq portes à hayon, à l'habitacle variable et à traction avant.

Malgré une motorisation minimaliste à quatre cylindres de 1,5 litre, la R16 assumait le rôle de nouveau vaisseau amiral de Renault. Cette berline de voyage à la forme élégante de fastback avait l'air d'un pur futur, elle faisait vieillir d'un coup les modèles habituels à hayon et montrait la voie aux voitures familiales des années 1970.

Il fallut une décennie entière pour que cette audacieuse tendance française devienne un phénomène de masse mondial qui toucha tous les segments, de la petite R5 à la noble Rover V8 (SD1) en passant par la VW Passat. Même lorsque son successeur, la Renault 20, fit ses débuts en 1975, la Renault 16 fut encore construite pendant cinq ans, alors qu'elle jouissait depuis longtemps d'un statut culte.

Après 1960, Renault avait négligé le segment supérieur du marché avec l'arrêt du modèle haut de gamme Frégate, et la production du reste de la gamme Renault avait diminué de près d'un quart en 1963, lorsque la France avait dû assouplir les droits de douane sur les importations.

Le patron de Renault, Pierre Dreyfus, a donc poussé à la construction d'une nouvelle usine près du Havre, dans laquelle la berline de tourisme d'un nouveau type, dessinée par le jeune designer Gaston Juchet, devait sortir des chaînes de montage.

Avec son grand capot et ses lignes obliques, au lieu de la marche rigide de la Peugeot 404, et dans un format compact, avec en plus une traction avant comme la Citroën DS, la Renault 16 signalait sa prétention au leadership dans la classe moyenne supérieure.

Cependant, tous ceux qui s'attendaient à trouver un moteur puissant et volumineux sous le long capot de la R16 ont été déçus. Au lieu de cela, un petit quatre cylindres de 1,5 litre ne développant que 40 kW (55 ch) se cachait derrière une roue de secours et derrière l'essieu avant.

Ce concept de «moteur central avant» a permis une répartition optimale du poids et une maniabilité étonnamment agile. Malgré cela, le châssis Renault était réglé avec la douceur d'un doux camembert, comme l'ont constaté les médias spécialisés.

En 1969, la Renault 16 se positionnait en France à la quatrième place des statistiques d'immatriculation avec environ 93'000 unités, et dans le monde entier, ce sont même près de 180'000 unités du modèle phare qui ont été vendues sur quatre continents.

Le président français Charles de Gaulle, qui vient de quitter ses fonctions, était satisfait : La Régie Renault, entreprise publique, prospérait à nouveau, car elle avait compris plus tôt que ses concurrents le type de voiture que les gens voulaient conduire dans le miracle économique qui s'achevait.

Toutefois, le concept de la R 16 ne pouvait être transposé que de manière limitée dans d'autres catégories. Renault en a fait l'expérience lorsque la R6, produite à partir de 1968, n'a connu qu'un succès éphémère malgré un design similaire. Même la Renault 20, présentée en 1975 et plus longue de presque 30 centimètres, ne parvint pas vraiment à remplacer la Renault 16, qui resta donc en production jusqu'en 1980.

Au total, 1,84 million de Renault 16 ont été livrées, la R20 atteignant un tiers de ce chiffre. Seule la VW Passat dépassa le volume de vente de la R16, mais elle nécessita pour cela plusieurs variantes de carrosserie. SP-X/RA