Vous avez entre les mains la Revue Automobile n°46. L’occasion était donc belle et elle colle avec l’actualité. Il y a une dizaine de jours, Valentino Rossi, VR46, la star italienne, celui qui a propulsé les GP motocyclistes au sommet de la popularité dans le monde entier, a plus que laissé entendre qu’il participerait aux courses du WEC, le Championnat du Monde d’Endurance, l’an prochain. Ce ne sera pas (encore) en hypercar, mais la décision est prise et devrait être confirmée dans les jours qui viennent, lorsque les promoteurs de l’endurance publieront une première liste des teams inscrits en hypercar et dans la nouvelle catégorie GT3.
WEC: Rossi au départ du Mans en 2024
Jean-Claude Schertenleib | 16.11.2023
46 Son numéro est plus qu’une marque de fabrique, c’est une icône. En 2024, il devrait être au départ des 24 Heures du Mans. Et ces derniers mois, il a reçu les conseils de deux pilotes suisses.
Avant de découvrir le pilotage de la LMP2 de Delétraz, Rossi a retrouvé son ex-équipier Nico Müller.
À Bahreïn, au lendemain de la finale du WEC 2023, Rossi a participé aux tests «rookies» dans la LMP2 qu’avait menée, la veille, le Genevois Louis Delétraz à la victoire et au titre: «Un essai avec la BMW M Hybrid V8 est prévu dans un avenir plus ou moins proche, c’était donc une bonne chose de pouvoir piloter une LMP2, parce que c’est assez proche en matière de charges aérodynamiques», avoue l’Italien, qui a bouclé son meilleur tour en 1’55’’118, à mettre en perspective avec le chrono de Charles Weerts, qui pilotait la même voiture, 1’54’’302. «Le plus bluffant, avec lui, c’est son humilité face au nouveau défi qu’il s’est lancé», confie Delétraz, qui a beaucoup parlé avec la star.
Nico Müller, témoin privilégié
Un autre Suisse est bien placé pour parler du phénomène, Nico Müller, qui a été son équipier chez Audi en GT3 l’an dernier, notamment lors des 24 Heures de Spa: «Chez lui, on découvre immédiatement une compréhension naturelle pour la technique et le pilotage. Il sait exactement ce qu’il doit faire pour améliorer le comportement de sa voiture. Ainsi, l’entendre parler des pneus est un moment étonnant, son niveau est extrêmement élevé, il s’est très vite adapté à son nouveau monde.»
Pilote officiel BMW en GT World Challenge Europe, Valentino Rossi partage le cockpit de sa BMW M4 GT3 avec le Belge Maxime Martin.
S’il a dès son plus jeune âge brillé sur quatre roues – nombreuses victoires en karting avant de passer à la moto –, Valentino Rossi est un immense champion non seulement dans l’âme, mais bien dans le corps. Quand il s’attaque à quelque chose de nouveau, il le fait à fond: «J’admire sa faim perpétuelle», reprend Nico Müller. «Il est très ambitieux, mais il n’a rien à prouver à personne, parce qu’il a été le plus grand pilote motocycliste de tous les temps; malgré ce statut, il veut aussi montrer qu’il peut être excellent sur quatre roues, on ne peut que s’incliner devant lui. Coup de chapeau!» Il faut dire que ses premiers flirts avec la course auto ont été remarqués.
Du très sérieux
Après de nombreuses présences «pour le fun» au rallyshow de Monza dès 1997, des engagements plus sérieux en WRC (notamment au rallye de Grande-Bretagne 2002 et à celui de Nouvelle-Zélande 2006) et plusieurs tests en F1 (voir encadré), Valentino Rossi s’attaque désormais à un monument: les 24 Heures du Mans. Jusqu’où peut-il aller? «Je crois, très loin», reprend Nico Müller. «Dès sa première saison en circuit, il a démontré sa rapidité. Il a certes encore des choses à apprendre, notamment comment gérer le trafic. Pour cela, il a besoin d’un peu de temps, mais je n’ai aucun doute: il peut s’immiscer dans la bagarre pour les premières places. Sa motivation est immense. Le talent? On n’en parle même pas.»
Pilote officiel BMW en GT World Challenge Europe, Valentino Rossi partage le cockpit de sa BMW M4 GT3 avec le Belge Maxime Martin.
On ajoutera son charisme, son aura, qualités qui sont des atouts dans le sport automobile. Particulièrement aujourd’hui, parce qu’il faut rassembler des budgets importants: «Uniquement avec sa très forte personnalité, son influence au sein d’une équipe est déjà énorme. L’an dernier, dès le premier jour de nos essais, j’ai compris l’importance de son feedback pour le team», conclut Müller. «Un grand Monsieur», ajoute Delétraz. Que deux pilotes suisses de premier plan ont appris à connaître un peu mieux ces douze derniers mois. Et qu’ils pourraient bien croiser régulièrement dans les années à venir.
Photos: WEC, BMW, Archive Nico Müller
«Pas besoin de conseils»
Valentino Rossi a testé à plusieurs reprises une Ferrari F1. La première fois, ce fut en 2004, sur la piste d’essais de Fiorano. Celui qui allait cette année-là remporter son premier titre MotoGP avec Yamaha, après plusieurs triomphes avec Honda, roule alors avec un casque de Michael Schumacher, pour passer inaperçu: «Une journée enthousiasmante. Piloter une F1 a été une expérience exceptionnelle et c’était génial, pour moi, de passer une journée, dans les traces de Schumacher.»
Deux ans plus tard, à Valencia, «Vale» roule cette fois en public, dans le cadre des premiers tests d’avant-saison. Il dispose d’une voiture aux anciennes spécifications, alors que «Schumi» et Massa étrennent leur nouvelle monoplace. Rossi est chronométré à 7 dixièmes de Schumacher, qui confie ce jour-là: «Je ne lui ai donné aucun conseil, il n’en a pas besoin. Quand on a la course dans le sang, on sait quoi faire.»
En Italie, c’est bientôt la folie. On parle même de Valentino Rossi au GP d’Italie à Monza, en 2009, l’année où Felipe Massa est sérieusement blessé à la tête pendant le GP de Hongrie. Cela n’ira pas plus loin, même si des discussions sérieuses se sont tenues entre les deux parties. «Valentino aurait été un excellent pilote de Formule 1, mais il a choisi un autre chemin», confie Stefano Domenicali, alors patron de la Scuderia. Dont le rêve – rassembler deux symboles italiens, Ferrari et Rossi – ne deviendra jamais réalité. JCS
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