Philip Egli a poussé un grand cri de joie en garant sa
Dallara F393 dans le parc fermé, près des casernes de Chamblon (VD).
Lionel Ryter arrive en trombe, se penche vers le cockpit d’Egli, lui
donne une petite tape sur l’épaule: «Espèce de petit diable, tu as
manifestement besoin de pression. C’est incroyable ce que tu as réussi à
faire!» Egli s’extirpant bientôt de sa F3, la file de ceux qui
attendent pour venir le féliciter s’allonge: Philip Egli est enfin
Champion de Suisse des Slaloms! Cela fait des années que le Glaronais
aurait fait un logique vainqueur, lui qui depuis sa première victoire
dans la discipline, le 13 octobre 2013, a remporté 54 des 87 courses
disputées, près de 70 %! Mais jusque-là, en raison du règlement sportif,
Egli avait toujours été désavantagé, les titres étant remportés par des
pilotes de voitures de tourisme. Or cette saison, l’Association
faîtière Auto Sport Suisse (ASS) a modifié ses règlements...
Eugster était tout proche
Ce fameux règlement a d’ailleurs permis à Lukas Eugster
de se retrouver tout près du graal après la première des deux manches.
En effet, à Chamblon, Lionel Ryter a réalisé un parcours de rêve lors de
sa première tentative, reléguant Egli à la deuxième place dans la
catégorie E2-Singelseater jusqu’à 2000 cm3; dans le même temps, Eugster
était sur le point de remporter sa sixième victoire de la saison en
E2-Sportcars jusqu’à 3000 cm3: «Honnêtement, je ne sais pas comment je
dois me sentir. Jusqu’à présent, Philip a remporté toutes les victoires
cette saison – cinq au total –, alors que j’étais à chaque fois deuxième
derrière lui. Philip est donc le champion logique.»
Mais Eugster,
secouant la tête, savait que telle était la règle du jeu. Lionel Ryter
lui aussi avait du mal à comprendre la situation; le Valaisan était en
tête du classement absolu après cette fameuse première manche et son non
moins fameux temps de 2’52’’497: «Je ne suis pas content de la
situation. Bien sûr que j’aime gagner, je n’ai pas eu une année facile,
l’équipe et moi avons beaucoup travaillé. Maintenant, la voiture me
convient, mais ce n’est pas possible que Philip perde encore le titre
parce que j’aurais gagné une fois.» Le règlement du slalom devrait être
adapté à celui du Championnat de Suisse de la Montagne, où deux titres
sont attribués, l’un en voitures de course, l’autre pour les voitures de
tourisme.
Mais revenons à nos moutons. Et à ce moment tendu entre
les deux manches: «Le temps de Ryter me surprend beaucoup», s’étonne
alors Philip Egli, vainqueur des huit slaloms organisés à Chamblon
depuis 2014, mais jamais avec un chrono autour des 2’52: «En 2015,
j’avais réalisé 2’53’’556.» Mais en 2024, ce n’était visiblement pas le
jour d’Egli: aux entraînements – il a plu légèrement –, il est resté
au-dessus de la barre des 3 minutes. Jamais son entourage et ses
concurrents ne I’avaient vu aussi tendu: «Je serais très déçu si le
compte ne devait pas être bon.»
Depuis le 30 avril 2023 à Ambri (TI),
Egli a remporté les neuf slaloms comptant pour le Championnat de Suisse.
Et si sa plus longue série de victoires devait effectivement
s’interrompre ce 23 juin 2024? Dans le paddock, la tension était
palpable. Egli s’est alors retiré, il a analysé son premier parcours sur
son ordinateur portable et a fait monter de nouveaux slicks sur sa
Dallara F393 pour cette course décisive: «Si Lionel a réussi un temps
dans les 2’52, je peux aussi le faire!»
«J’ai besoin de plus de champagne!»
Et il l’a fait. Et même beaucoup mieux: il n’a fallu à
Egli que 2’50’’728! «La performance était là, l’adhérence était là...
J’ai besoin de plus de champagne!», a crié Philip Egli après cette
course magistrale. Lionel Ryter et Lukas Eugster ont été parmi les
premiers à venir le féliciter, tandis que le deuxième et le troisième de
ce slalom de Chamblon étaient visiblement plus à l’aise. Et puis, il y
avait aussi le papa d’Egli, Rolf, qui a versé quelques larmes de joie
dans les bras de son fils.
Dans ce tohu-bohu autour du nouveau Champion de Suisse,
d’autres vainqueurs sont presque passés inaperçus. Comme par exemple le
huitième du classement général, Fabrice Winiger (Porsche GT3 Cup); pour
la deuxième fois après Romont (FR) en 2019, il a été le pilote de
tourisme le plus rapide, privant ainsi de victoire pour la première fois
de l’année la jeune étoile Matthias Bischofberger (Porsche 997 GT3
Cup). «Cela m’a surpris, mais le temps frais de cette journée a été
favorable aux pneus et au moteur», explique Winiger. Le succès, Martin
Oliver Bürki l’avait également en ligne de mire: au volant de sa
cultissime BMW M-Power E33, le Bernois participait à sa première course
de l’année et s’est immédiatement classé troisième meilleur pilote en
tourisme, derrière Winiger et Christian Bralla, qui avait lui aussi une
chance théorique de remporter le titre. «Je suis très content de mon
retour! Aux essais, j’ai été le plus rapide. Lors de la première manche,
j’avais encore des réserves; malheureusement, cela n’a pas aussi bien
fonctionné lors de la seconde.» Mais Bürki n’a pas voulu s’attarder sur
son propre sort, il a préféré féliciter Egli, son successeur:
«Maintenant, moi et mon titre, c’est de l’histoire ancienne...» a-t-il
tout de même déclaré avec un peu de nostalgie. Même s’il peut très bien
vivre avec ce successeur.
Eugster arrête
Reste que la nostalgie s’est tout de même installée
dans les jours qui ont suivi la fête: Lukas Eugster, l’ami d’Egli et son
plus grand concurrent au cours de ces trois dernières années, a mis fin
à sa carrière, a annoncé l’ASS. Son projet avec la Ligier JS53 est
abandonné. D’un point de vue conceptuel, il aurait été difficile de
tenir tête à Egli: «Et dès le slalom de Bière, j’ai senti que je n’étais
plus à fond», explique Eugster, qui pourrait envisager dans le futur
quelques départs en tant qu’invité.
Résultats
Slalom de Chamblon (VD), 6e et dernière manche du Championnat de Suisse des Slaloms, 4,3 km, 66 portes: 1. Philip Egli, Dallara F393 EPR-7, 2’50’’728 (meilleur temps des deux manches). 2. Lionel Ryter, Tatuus-Renault 2.0, 2’52’’497. 3. Lukas Eugster, Ligier JS53 Evo 2, 2’56’’316. 4. Victor Darbellay, Tatuus-FR Evo, 3’00’’039. 5. Stéphane Maréchal, Renault-Tatuus 2.0, 2’03’’472. 6. Antonio Scolaro, Nova Proto NP03, 3’04’’266. 7. Joffrey Salomon, Formule Jedi, 3’07’’993. 8. Fabrice Winiger, Porsche GT3 Cup, 3’09’’178. 9. Kévin da Costa, Tatuus-FR 2.0, 3’09’’879. 10. Christian Bralla, Fiat X1/9, 3’10’’528. 11. Martin Oliver Bürki, BMW M-Power E33, 3’10’’969. 12. Matthias Bischofberger, Porsche 997 GT3 Cup, 3’11’’107. 13. Christoph Zwahlen, Porsche 997 GTR Cup, 3’13’’826. 14. Stephan Burri, VW Scirocco, 3’14’’434. 15. Arnaud Donzé, VW Golf HPR, 3’17’’124. 16. Nicola Roberto, Peugeot 205, 3’17’’424. 17. Kevin Métroz, BMW M3, 3’18’’092. 18. Filipe Santiago, Bery ES7 CP4, 3’18’’663. 19. Aramis Cereghetti, BMW M5, 3’18’’886. 20. Christophe Oulevay, VW Scirocco, 3’20’’617. 21. Roger Hürzeler, Opel Kadett C, 3’20’’638. 22. Joël Jäggi, Radical SR4 Sportcars, 3’21’’005. 23. Christophe Maréchal, BMW 325i E30, 3’21’’669. 24. Tom Huwiler, BMW R30 HRT, 3’22’’509. 25. Etienne Beyeler, Opel Ascona B, 3’22’’734. 26. Jannis Jeremias, VW Polo, 3’22’’831. 27. Jérôme Plancherel, Renault Clio 2 Cup, 3’22’’975. 28. Michael Chamorel, BRC 2, 3’23’’194. 29. Michael Zbinden, Opel Kadett GT/E, 3’24’’159. 30. Christian Bartlome, Audi 50, 3’24’’191. – 112 pilotes au départ, 106 classés, 2 disqualifiés.
Classement par catégories.– Supersérie (SS) jusqu’à 2000 cm3 (4 pilotes au départ): 1. S. Weibel, Subaru BRZ, 3’38’’558. – SS plus de 2000 cm3 (2): 1. I. Kilchenmann, Ford Fiesta ST, 3’42’’723. – SS Compétition jusqu’à 3000 cm3 (2): 1. P. Kuster, Toyota Yaris GR, 3’40’’157. – SS Compétition plus de 3000 cm3 (2): 1. A. Comby, Porsche Cayman GT4 RS, 3’31’’732. – N/ISN/R1 (2): 1. N. Pasche, Renault Clio RS, 3’39’’022. – PSA-Transition-Trophy N (7): 1. H.-P. Thöni, Peugeot 106 16V, 3’36’’734. 2. T. Walther, Citroën Saxo, 3’40’’950. 3. T. Gal, Peugeot 106 S16, 3’45’’038. – PSA-Transition-Trophy A (1): 1. M. Serex, Peugeot 106, 3’56’’872. – A/ISA/R2/R3 jusqu’à 1600 cm3 (1): 1. M. Langenegger, Citroën C2, 3’37’’226. – A/ISA/R2/R3 jusqu’à 2000 cm3 (7): 1. I. Brantschen, Renault Clio Ragnotti, 3’31’’264. 2. T. Ruesch, Honda Civic Type-R, 3’33’’973. 3. C. Leuba, Renault Clio RS, 3’35’’357. – A/ISA/R2/R3 jusqu’à 2500 cm3 (1): 1. Y. Héritier, Renault Clio, 3’39’’988. – Interswiss (IS) jusqu’à 1400 cm3 (1): 1. A. Helm, VW Polo 1, 3’27’’223. – IS jusqu’à 1600 cm3 (5): 1. C. Oulevay, VW Scirroco, 3’20’’617. 2. J. Jeremias, VW Polo, 3’22’’831. 3. D. Schneider, Citroën Saxo, 3’43’’616. – IS jusqu’à 2000 cm3 (10): 1. S. Burri, VW Scirocco, 3’14’’434. 2. A. Donzé, VW Golf HPR, 3’17’’124. 3. A. Grispino, Renault Clio R3 Evo, 3’24’’435. – IS jusqu’à 2500 cm3 (2): 1. M. Zbinden, Opel Kadett GT/E, 3’24’’159. – IS plus de 2500 cm3 (1): 1. M. Bisig, BMW E30 M-Power, 3’38’’806. – Historic (1): 1. W. Waeber, Porsche SC Gr. 4, 3’36’’756. – E1 jusqu’à 1400 cm3 (7): 1. C. Bartlome, Audi 50, 3’24’’191. 2. H. Wüthrich, Mini Cooper S, 3’30’’679. 3. D. Musch, Mini Cooper S, 3’34’’550. – E1 jusqu’à 1600 cm3 (6): 1. L. Roberto, Peugeot 106, 3’24’’665. 2. W. Willener, VW Golf, 3’25’’718. 3. N. Aliberti, VW Golf 1, 3’27’’010. – E1 jusqu’à 2000 cm3 (14): 1. C. Bralla, Fiat X1/9, 3’10’’528. 2. N. Roberto, Peugeot 205, 3’17’’424. 3. R. Hürzeler, Opel Kadett C, 3’20’’638. – E1 jusqu’à 2500 cm3 (6): 1. E. Beyeler, Opel Ascona B, 3’22’’734. 2. S. Chiquita, BMW E30 RPM, 3’25’’937. 3. A. Mathey, Opel Kadett GTE, 3’28’’493. – E1 jusqu’à 3000 cm3 (7): 1. M.-O. Bürki, BMW M-Power E33, 3’10’’969. 2. K. Métroz, BMW M3, 3’18’’092. 3. C. Maréchal, BMW 325i E30, 3’21’’669. – E1 jusqu’à 3500 cm3 (6): 1. V. Zenklusen, Subaru Impreza Type R, 3’25’’834. 2. P. Lovey, Mazda 323 GTX, 3’26’’374. 3. T. Meier, Opel Astra, 3’34’’745. – E1 jusqu’à 4000 cm3 (4): 1. F. Winiger, Porsche GT3 Cup, 3’09’’178. – E2 Sportcars (SC) jusqu’à 1400 cm3 (3): 1. J. Jäggi, Radical SR4 Sportcar, 3’21’’005. – E2 SC jusqu’à 1600 cm3 (1): 1. A. Scolaro, Nova Proto NP03, 3’04’’266. – E2 jusqu’à 3000 cm3 (1): 1. L. Eugster, Ligier JS53 Evo 2, 2’56’’316. – E2 Singleseater (SS) jusqu’à 1600 cm3 (3): 1. J. Salomon, Formule Jedi, 3’07’’993. – E2 SS jusqu’à 2000 cm3 (5): 1. P. Egli, Dallara F393 EPR-7, 2’50’’738. 2. L. Ryter, Tatuus-Renault 2.0, 2’52’’497. 3. V. Darbellay, Tatuus-FR Evo, 3’00’’039. – Suzuki Swiss Racing Cup (tous Suzuki Swift Sport Hybrid): 1. S. Fehr, 3’40’’337. 2. M. Béring, 3’41’’320. 3. S. Glanzmann, 3’41’’701.
Classement final du Championnat de Suisse des Slaloms: 1. Egli, 100 points (6 victoires scratch). 2. Eugster 100. 3. Bralla 100. 4. Burri 95. 5. Bischofberger 95. – Suzuki-Cup: 1. Fehr 136. 2. Rico Thomann, 106. 3. Béring 103.