WEC L’histoire d’Alpine est intimement liée au sport automobile. Et parce que Renault a de gros projets avec cette marque sur la route, il lui faut décrocher des victoires sur la piste, et ce
y compris au Mans, course phare du Championnat du Monde.
«You can’t grow without remembering your roots»: on ne
peut pas grandir sans se souvenir de ses racines. C’est en ces termes
anglais que le président du groupe Renault, Luca de Meo, a expliqué la
tendance rétro actuelle de son entreprise. Les racines d’Alpine se
trouvent dans le sport automobile: le fondateur de l’entreprise, Jean
Rédélé, a participé à sa première course en 1951, au volant d’une
Renault 4CV. Victoire! Un an plus tard, il prenait le départ du Mans:
défaite! Cela n’a pas empêché le jeune Rédélé de continuer à construire
ses propres voitures de course. Depuis lors, le nom d’Alpine est devenu
une constante dans le sport automobile. Ses succès, en revanche,
l’étaient moins.
Aujourd’hui, Alpine est engagé dans les deux catégories
les plus prisées du sport automobile: la Formule 1 et le WEC. En
Formule 1, l’écurie se doit rapidement de remporter des victoires, car
elle est à la traîne: deux podiums et une sixième place au classement
des constructeurs ne sont guère satisfaisants. En Championnat du Monde
d’Endurance, l’écurie s’engagera cette année dans la catégorie reine,
celle des Hypercars, où elle s’appuiera sur l’expérience acquise ces
dernières années sur l’Oreca-Gibson en LMP2. L’A424, nom de la nouvelle
LMDh, a donc tout pour bien faire sur le papier. Cependant, le directeur
de l’équipe, Philippe Sinault, ne veut pas se lancer dans des
pronostics concrets.
Le plan «Renaulution»
En résumé, il faut être modeste, mais ambitieux,
pense-t-il: «La première année, il s’agira pour nous d’apprendre.
L’engagement d’Alpine Racing, non seulement en Formule 1, mais aussi en
endurance, fait entièrement partie du plan ‹Renaulution›»,
explique-t-il, reprenant le néologisme inventé par son patron, Luca de
Meo.
Du côté des véhicules de tourisme, Alpine entend
proposer jusqu’à sept voitures électriques sportives dans sa gamme d’ici
2030, pour un retour à la rentabilité dès 2026. Alpine Racing est
primordial pour l’identité de la marque. En effet, les succès dans le
sport automobile légitiment la poursuite de la filiale sportive de
Renault. Pour cela, il faut remporter des succès en WEC, car Alpine n’a
que très peu de chance de régater en tête en Formule 1 dans un avenir
proche. En s’engageant dans la catégorie LMDh, Alpine s’épargne le
développement en interne d’une plateforme et d’un système hybride, qui
sont pris en charge par des entreprises externes, conformément au
règlement. Dans le cas de l’A424, le châssis est fourni par Oreca, avec
qui Alpine a déjà travaillé en LMP2. La motorisation hybride est fournie
par Bosch et le moteur est développé et construit sur le site de Viry,
près de Paris, en collaboration avec Mecachrome.
Schumacher dans le cockpit
Pour la course d’ouverture au Qatar, le 3 mars, Alpine
alignera deux voitures sur la ligne de départ. L’attention sera portée
sur Mick Schumacher, qui pilotera la voiture N°36. Le jeune Allemand ne
fait pas mystère des raisons qui l’ont poussé à passer de la Formule 1 à
l’endurance: «J’espère ainsi revenir en F1.» Après avoir été pilote de
réserve chez Mercedes et McLaren, Schumacher restera pilote de réserve
pour Mercedes en Formule 1 cette saison. Et pourrait lorgner sur le
cockpit de Lewis Hamilton, qui va se libérer en fin d’année. Mais cela
reste de la musique d’avenir: «Je suis ravi de courir en WEC. C’est la
discipline la plus proche de la Formule 1. Et beaucoup de grands noms de
la F1 ont aussi fait de l’endurance», a expliqué Schumi Junior (24 ans)
lors de la présentation conjointe de la voiture du WEC et de la
nouvelle Formule 1 à Enstone, en Grande-Bretagne. Mick Schumacher
pilotera aux côtés de Nicolas Lapierre et Matthieu Vaxivière. L’équipage
de la N°35 sera quant à lui formé d’un trio de spécialistes du LMP2 que
sont Paul-Loup Chatin, Charles Milesi et Ferdinand Habsburg. Philippe
Sinault est convaincu qu’il s’agit là d’une excellente répartition des
forces: «Nous n’avons fait absolument aucun compromis».
Les essais réalisés jusqu’à présent ont été très
concluants, continue Philippe Sinault. Les deux voitures ont déjà
parcouru plus de 15 000 km sans présenter d’évidentes faiblesses. Mais
le directeur reste réaliste quant aux chances d’Alpine de l’emporter
face à une concurrence toujours plus nombreuse. Et relevée!
Dans ce contexte, il reste à déterminer si le choix du
LMDh (châssis commun) sera plus avantageux que celui du LMH (châssis
développé en interne). Les victoires de Ferrari au Mans et de Toyota en
championnat (tous deux des LMH) tendent à prouver le contraire. Et puis,
Alpine devra également composer avec BMW, Cadillac, Isotta Fraschini,
Lamborghini et Porsche. Rien que ça!