Pas de frontières pour le CO2

Ramon Egger | 30.05.2024

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Ramon Egger, ancien rédacteur en chef, compte parmi les membres de la direction de la Revue Automobile.

Le «Jour du dépassement». Il marque le jour de l’année où l’humanité a consommé plus de ressources naturelles que la Terre ne peut en renouveler en un an. Plus nous prélevons dans la nature, plus vite ces ressources s’épuisent. C’est une mesure claire qui met l’accent sur l’utilisation raisonnable des ressources plutôt que sur le seul changement climatique. Cette année, en août, nous aurons abattu plus d’arbres qu’il n’en repousse, pêché plus de poissons qu’il ne s’en reproduit et mangé plus de céréales qu’il n’en repousse. C’est un concept évident dont on pourrait s’inspirer pour mener une vie durable, au-delà de la panique liée au changement climatique. Mais ce n’est pas vrai. Car en fin de compte, le «Jour du dépassement» se réduit lui aussi – certes de manière détournée – aux émissions de CO₂. Pourquoi écrivons-nous dès maintenant sur ce sujet, alors qu’il n’arrivera qu’en août? Parce qu’il est également calculé au niveau national. Et pour la Suisse, il est tombé cette année sur le 27 mai.

En comparaison internationale, la Suisse est donc très mal placée, puisqu’elle consomme deux fois plus que la moyenne mondiale. Cela donne l’occasion aux habituels détracteurs – les Verts – de dénoncer notre mode de vie dispendieux et opulent, d’appeler à la décroissance, d’interdire les SUV et de vouloir réduire le trafic routier. La Suisse doit se serrer la ceinture jusqu’à ce que nous soyons positifs en termes d’écobilan. Savez-vous qui est positif? La Russie, qui émet cinquante fois plus de CO₂ que la Suisse. Ou le Canada, qui en émet quinze fois plus. Mais ce sont aussi de grands pays avec beaucoup de forêts et une faible densité de population. On comprend vite qu’avoir de très nombreux d’habitants, cela mène tout droit à un mauvais bilan écologique. L’absurdité de ce «Jour du dépassement» se manifeste donc tout particulièrement dans la répartition par nation.

Le CO₂ ne s’arrête pas aux frontières et la répartition des ressources naturelles ne s’arrête pas, dans la plupart des cas, aux limites nationales. Qu’apprenons-nous donc? Ceux qui voudraient voir les frontières disparaître les utilisent volontiers lorsque cela sert leur propre narratif sur la Suisse qui agit mal. Et les bonnes intentions sont rarement gratuites, surtout lorsqu’elles servent un agenda politique.

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